Ce qui a dévoré nos coeurs

Fiche identité

  • Titre du livre : Ce qui a dévoré nos cœurs
  • Auteur : Louise Erdrich
  • Nombre de pages : 300
  • Édition : Le livre de poche
  • Année de publication : 2005

Résumé

Faye vit avec sa mère dans une petite bourgade du New Hampshire. Leur quotidien est triste, rythmé par leur travail commun qui consiste à faire l’inventaire d’une maison lors du décès des propriétaires. Un jour, lors d’un inventaire, elle retrouve un tambour amérindien qui a une valeur inestimable. 

Avis    

C’est le titre de ce roman qui m’a attiré, ainsi que cette couverture chatoyante. J’ai découvert un récit particulier dont le fil conducteur est un tambour amérindien.
Le livre commence par l’histoire de Faye, qui nous raconte son quotidien. On sent qu’une ombre pèse sur sa vie, qu’un secret existe qui l’empêche d’être heureuse. Cette première partie est assez longue, et honnêtement, je commençais à sentir une lassitude dans cette lecture jusqu’à ce qu’on arrive à la deuxième partie du livre, début de la genèse du tambour.
Le lecteur bascule dans un récit coloré, original qui raconte la vie d’une famille amérindienne : une histoire d’amour qui tourne mal, un homme en proie à la déchéance à cause de l’alcool, un tambour magique censé connecter les vivants et les esprits pour les soigner, etc. J’ai adoré cette partie sur les traditions ancestrales, les us et coutumes ainsi que la magie un peu mystique véhiculée par le tambour.
La troisième partie, plus contemporaine, raconte la tragédie vécue par Ira, une mère célibataire dans une réserve indienne. On découvre ici leur dur quotidien, des vies minées par la pauvreté chronique, le froid, la solitude et la faim.
Le style d’écriture est riche, poétique et agréable. À chaque changement de personnage, le ton change vraiment, ce qui donne un réalisme saisissant lorsqu’on lit cet ouvrage. Pour aimer ce livre, il faut accepter le mystère, l’insaisissable et la magie…
Voici deux passages qui m’ont profondément touché. La première est la rencontre avec un loup : « And the wolf answered, not in words, but with a continuation of that stare. We live because we live. He did not ask questions. He did not give reasons. And I understood him then. The wolves accept the life they are given. They do not look around them and wish for a different life, or shorten their lives resenting the humans, or even fear them anymore than is appropriate. They are efficient. They deal with what they encounter and then go on. Minute by minute. One day to the next… »
Et la seconde est la conclusion de Faye sur la nature même de la vie : « Life will break you. Nobody can protect you from that, and being alone won’t either, for solitude will also break you with its yearning. You have to love. You have to feel. It is the reason you are here on earth. You have to risk your heart. You are here to be swallowed up. And when it happens that you are broken, or betrayed, or left, or hurt, or death brushes too near, let yourself sit by an apple tree and listen to the apples falling all around you in heaps, wasting their sweetness. Tell yourself that you tasted as many as you could. »

On m’appelle Demon Copperhead

Fiche identité

  • Titre du livre : On m’appelle Demon Copperhead 
  • Auteur : Barbara Kingsolver 
  • Nombre de pages : 624
  • Édition : Albin Michel
  • Année de publication : 2022

Résumé

Né à même le sol d’un mobil-home, au fin fond des Appalaches, Demon vit seul avec sa mère, une jeune toxicomane, qui essaie de l’élever tant bien que mal.

Avis     

C’est le second livre que je lis de cet auteur, mais encore une fois, elle m’a mis une terrible claque. Cette histoire reprend la trame de David Copperfield, mais transposé à notre époque contemporaine, dans un milieu défavorisé quelque part au milieu des Appalaches.
Nous allons suivre les tribulations de Demon Copperhead qui vit seul avec sa mère toxicomane. Leur quotidien marchait cahin-caha jusqu’à l’arrivée de son beau-père qui vient bouleverser toute son existence. Enfant battu, orphelin à cause d’une overdose de sa mère, envoyé dans des familles d’accueil qui l’exploitent, fugueur, il finit par retrouver un membre de sa famille qui accepte de l’aider. Au moment où le lecteur espère que Demon s’en sort enfin, le sort s’acharne de nouveau sur lui à cause de sa dépendance aux médicaments après un accident de football au genou.  
Cette histoire est écrite à la première personne, dans un langage familier. Grâce à ce procédé, on s’attache très vite au personnage principal. Malgré toutes les épreuves qu’il vit, Demon conserve cette once de résilience et de courage.
Tout dans cette histoire est poignant. La misère engendre la misère, sans parfois aucun signe de rédemption ou d’espoir. L’auteur dénonce la pauvreté qui gangrène les zones rurales et délaissées des Appalaches ; l’échec des placements familiaux à cause de l’exploitation illégale des enfants par les familles d’accueil ; le business fructueux des industries pharmaceutiques qui encourageaient les médecins à prescrire des opiacées qui rendaient les patients dépendants ; l’absence de perspectives d’emploi et d’avenir dans la région qui devient un cercle infernal et infini de chômage de générations en générations ; l’addiction à la drogue et ses ravages.
Ce roman est sombre, dur, mais avec quelques gouttes d’espoir. Quand on naît au mauvais endroit au mauvais moment, les dés sont pipés avant même de jouer. Ce livre nous pousse dans le non-jugement, dans la compréhension et dans l’empathie, dans la lutte pour l’injustice. On ne peut pas changer le destin de tout le monde, mais on peut aider à notre petite échelle et faire une différence par notre générosité.
Je suis sortie bouleversée de ce roman. Non seulement le style d’écriture est magnifique, doux et léger, mais en plus, il irradie d’une force et d’une énergie incroyable. Je vous dis, j’ai pris une claque, un uppercut ! À la dernière page, je quittais une famille, des amis de longue date. Demon, Angus, Mrs Peggot, Miss Annie, Tommy vous allez tellement me manquer !
Un grand merci à l’auteur pour ce chef-d’œuvre !

Autre(s) livre(s) de cet auteur commentés dans ce blog : Les yeux dans les arbres