La prisonnière des Sargasses

Fiche identité

  • Titre du livre : La prisonnière des Sargasses
  • Auteur : Jean Rhys
  • Nombre de pages : 252
  • Édition : Gallimard
  • Année de publication : 1966 

Résumé

Antoinette Cosway vit dans le domaine de Coulibri qui se trouve en Jamaïque. C’est dans cette maison en ruine et dans la pauvreté qu’elle passe son enfance, au milieu des esclaves. Une révolte oblige sa famille à quitter les lieux. Sa vie bascule alors : elle est envoyée dans un couvent qu’elle ne quittera que pour épouser un Anglais distant et égoïste.

Avis    

Ce livre raconte une histoire assez sombre, lourde et oppressante. Tout le long de ce récit, nous sommes habités par ce paysage idyllique des îles tropicales, mais avec une atmosphère lourde et étouffante. On sent que l’ambiance est malsaine, et que l’orage est proche d’éclater.
Tout commence par une enfance dans une maison en ruine, isolée du monde, où Antoinette vit au milieu des esclaves dans un dénuement total. Elle se comporte comme une sauvagesse jusqu’au jour où sa mère se remarie avec un autre homme. Sa vie bascule de nouveau quand ils doivent quitter leur domaine à cause d’une révolte des esclaves. Cette première partie est touchante, car on découvre Antoinette dans sa petite vie, ses déceptions et le terrible drame qui a entraîné leur fuite.
Puis arrivent la seconde partie et la troisième partie du livre. C’est une partie floue, un peu nébuleuse où on se demande qui est le réel bourreau. Est-ce que le mari est un homme diabolique, un pervers narcissique qui prend plaisir à faire souffrir sa femme ? Ou bien, est-ce Antoinette qui est folle à lier, alcoolique et dangereuse ? Son mari l’enferme-t-il pour veiller à sa sécurité ou bien souhaite-t-il la tuer à petit feu ? Il y a ce flou oppressant où on ne sait pas d’où le danger vient. En plus, il est question ici de magie noire, de sorcellerie, de haine, ce qui donne une ambiance encore plus angoissante et sombre. Mon hypothèse est que son mari est un homme vil et intéressé, qui profitera de la vulnérabilité d’Antoinette pour la tourmenter, l’humilier et être violent avec elle. Après toutes les épreuves qu’elle a vécues, sa raison aurait cédé, car à l’époque, il n’y avait aucun moyen de s’échapper d’une union malheureuse.
On découvre aussi l’Angleterre coloniale de l’époque du XIXème siècle, avec ces créoles anglais ruinés qui se méprisent entre eux, et méprisent encore plus les Noirs bien qu’ils vivent presque aussi pauvrement qu’eux.
Le style d’écriture est lourd, flou et parfois peu clair. On ne comprend pas des fois qui parle, dans quel contexte. Les personnages sont complexes, dans cette zone grise effrayante où rien n’est clair. Je suis sortie de ce livre avec un profond malaise, d’où cette note mitigée.

Traverser les montagnes et venir naître ici

Fiche identité

  • Titre du livre : Traverser les montagnes et venir naître ici
  • Auteur : Marie Pavlenko
  • Nombre de pages : 384
  • Édition : Pocket
  • Année de publication : 2024

Résumé

Astrid a tout perdu. Elle quitte la région parisienne pour s’installer dans une région montagneuse et sauvage du Mercantour. Soraya a tout laissé derrière elle pour rejoindre en cachette la frontière française. Dans son ventre grandit une vie qu’elle déteste.
Lorsque ces deux destins se rencontrent, elles essaient de s’apprivoiser. 

Avis    

Ce livre est une pure merveille que j’ai rencontré sur ma route. Le titre est déjà très beau, mais le lire fut une expérience incroyable. C’est l’histoire de deux destins qui se rencontrent : Astrid, qui a perdu sa famille dans un tragique accident ; Soraya qui a quitté la Syrie pour se réfugier clandestinement en France. Chacune d’elles porte une douleur : le deuil, la perte d’êtres chers et la perte d’une vie qu’on croyait acquise.
Qu’est-ce qui reste quand il ne reste rien ? L’espoir, la survie jour après jour. Un pas à la fois. Une respiration à la fois. Un jour à la fois.
Je craignais que ce livre sombre dans le pathétique, la colère ou même les sentiments mielleux, mais jusqu’au bout, il est resté très lumineux, très beau et très doux. On vit avec ces deux personnages le deuil, le courage, la résilience, la solidarité, l’espoir, l’amitié, etc.
Les personnages principaux sont magnifiquement décrits. On comprend leurs gestes, on comprend ce qui les anime sans les juger. On comprend que quand on traverse l’enfer, en sortir est un miracle. La vie a une façon à elle de continuer envers et contre tout.
L’auteur évoque le parcours chaotique des migrants pour arriver dans un pays sûr. J’aime son engagement, sa façon de décrire les tragédies vécues par ces gens sans sombrer dans la haine ou dans des descriptions morbides ou violentes. Tout est dit, d’une manière juste et vraie.
L’auteur a une plume très douce, très belle et très poétique. Elle sait décrire des événements tragiques d’une manière si délicate que cela ressemble à un flocon de neige qui se pose délicatement sur la main. La fin de cette histoire est juste poignante.
C’est un roman captivant, éprouvant, mais empli d’une telle lumière qu’on ressort de ce livre complètement ému. Pour ma part, ça m’a permis de prendre du recul sur ma vie personnelle. Il y a des gens qui vivent des tragédies pires que la petite égratignure que je subis en ce moment, et qui garde en eux de l’amour, de la joie et de l’espoir pour l’humanité. C’est un livre à mettre entre toutes les mains !